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Une petite histoire sur le surnaturelle tirée du recueil "Au-delà des contrées"

     Laurent marche seul dans le parc de sa ville, seul pour échapper au brouhaha du monde urbain, seul parce que ça fait un moment qu’il l’est, seul parce qu’il a décidé de vivre sans être tributaire de quelqu’un, seul pour pouvoir réfléchir. Il fait le tour de l’étang pour se vider l’esprit et penser à autre chose. Il croise des gens et ne les regarde pas ; Laurent veut qu’on lui foute la paix. Il s’assied sur un banc et contemple l’étang devant lui et les quelques canards qui flottent dessus. Ces derniers mois ont été intenses et maintenant il doit décider si la situation vaut le coup d’être continuée ou pas ; le suicide ou la vie d’ermite. Le suicide est une solution pour mettre fin à une situation ou une condition, est-elle seulement considérée comme un aboutissement ou même une issue ?

Depuis plusieurs années Laurent a choisi de vivre à la façon d’un ermite des temps moderne ; seul au milieu de tout le monde, meilleur moyen d’être d’une discrétion absolue. Il faut dire que le monde qui l’entoure l’insupporte, les gens l’insupportent, la vie l’insupporte. Assis sur ce banc, il ne voit même pas les pigeons qui viennent béqueter les quelques miettes de pain laissées par le précédent promeneur, pendant que d’autres se font la cour, roucoulant et faisant la roue en bombant le torse, alors que d’autres s’accouplent devant Laurent sans aucun état d’âme et dans une indifférence totale.

 

Tout ça a commencé après son accident, auparavant Laurent était un type normal avec des gens proches dans son entourage, un travail qu’il aimait bien -pour peu que l’on puisse aimer son travail-  et même une compagne avec qui il vivait et avec qui il avait des projets, maintenant depuis l’accident, rien n’est plus comme avant ; il ne supporte plus rien. Après son accident les mots de tête ont commencé à se manifester, d’abord doucement, puis de plus en plus vigoureusement et de plus en plus fréquemment, pour finir avec certain matin où il ne puisse plus se lever. Les médecins ont mis ça sur le compte du contre coup de l’accident, un syndrome post traumatique, puis sur le compte de l’impressionnant accident dans lequel il aurait dû y rester, ayant même pratiqué une biopsie pour déceler une éventuelle céphalée de Horton, qui n’a rien donné, et après les médecins ont…et bien les médecins ne savaient plus, ne savaient rien et n’avaient plus d’arguments, depuis Laurent reste avec ses maux de tête. Après les maux de tête sont arrivés les acouphènes, symptôme bizarre qui fait que votre tête entend toujours des bruits à la façon de ses vieilles télévisions au tube cathodique qui n’émettent plus en déversant leur sifflement bien caractéristique ; la bataille des points blancs contre les points noirs, à moins que ce ne soit le contraire. Après une nouvelle batterie d’examens pour déterminer si les origines de ces manifestations sont auditives ou neurologiques et de savoir s’il y a une cause à effet entre les maux de tête et les acouphènes, les médecins n’ont rien décelé, les résultats n’ont rien révélé, comme d’habitude.  Laurent a des maux de tête et des acouphènes qui n’ont aucune origine et qui n’ont aucune pathologie analogue. L’un lui gâche ses journées et l’autre l’empêche de dormir.

Malgré tout, depuis quelque temps les maux de tête se sont atténués, maintenant ils ne surviennent que par crise surtout depuis qu’il a ses phénomènes.

 

Tout a commencé par une belle journée de septembre, Laurent était en pleine forme et de plus il n’avait plus de maux de tête depuis plusieurs jours, ce qui justifiait, en partie, sa bonne humeur. Il déambulait dans la ville prenant l’air en faisant quelques achats. Il profitait aussi des bienfaits du soleil qui dardait ses rayons encore chauds d’une arrière-saison prometteuse. Traversant sur les passages cloutés d’un carrefour, une voiture surprend Laurent, passant juste devant lui et manquant de peu de le renverser, presqu’à lui rouler sur les pieds. Pourtant Laurent avait fait attention au petit bonhomme, vérifiant qu’il soit vert. Le type dans la voiture insulte Laurent en proférant des menaces, Laurent qui est un peu surpris de ce qui se produisait, gueule à son tour sur le type qui continuait de vociférer des insanités en sortant son bras par la portière pour lui faire des gestes obscènes.

  • Va mourir ! lui dit Laurent dans un  dernier hurlement.

Pour toute réponse, le type enfonce l’accélérateur et au même instant Laurent se tient la tête parce qu’un mal de crâne lui tambourine le crâne, il fait quelques pas pour tomber à genoux sur le trottoir. La rue du moulin, par laquelle le type est partie, se trouve en sens unique et les personnes ayant assisté à l’altercation, ne comprennent pas pourquoi la voiture fait une telle embardée. La voiture se déplace à vive allure fait un écart dans un bruit assourdissant comme si quelqu’un, un géant avait mis une grosse gifle au véhicule, défonçant tout un côté de la voiture, pliant le véhicule presque en deux, propulsant la carlingue et finissant sa course dans un pilier d’immeuble. Le choc est d’une telle violence que le type meurt sur le coup, malgré les airbags qui se sont déclenchés.

Laurent comprend, Après cet épisode, que ses crises de maux de tête sont dues à des pulsions, à des crises de nerf et qu’il faut pour cela se contrôler, Laurent s’aperçoit que ce n’est pas facile de garder son sang-froid tous les jours, à moins d’être coupé du monde ; et encore. Peu de temps après l’épisode du type à la voiture, Laurent est de nouveau confronté à la sauvagerie des gens devant un distributeur de billets de banque où une femme se fait arracher son sac à main après avoir retiré de l’argent. Laurent assiste à la scène apercevant une personne casquée essayant d’arracher un sac à une dame qui hurle en se cramponnant aux anses du malheureux sac à main, le type traîne la femme sur le sol accrochée au sac et commence par la frapper à coup de pied dans le ventre et dans le dos. Laurent se précipite et pousse le type pour qu’il cesse de frapper la femme à terre, le type rétorque en fonçant sur Laurent lui assenant un coup de tête et dans un dernier assaut, arrache le sac des mains de la femme qui pleure et qui hurle. Cette agression, qui devient monnaie courante par les temps qui courent, se passe en pleine journée alors que des gens vaquent à leurs occupations, assistant, de près ou de loin, à l’agression prenant même à l’occasion des photos et filmant la scène pour les mettre sur les réseaux sociaux et pourquoi pas récupérer des likes ; des fois que ça fasse le buzz. Laurent prend le coup de casque en plein visage entre le front et le haut du nez s’affalant de tout son long sur le dos, se tenant le visage dans ses mains.

  • Oh ! putain, j’vais te broyer la gueule ! dit Laurent en hurlant dans ses mains surtout à cause de la douleur, déversant des flots de sangs par le nez et la bouche.

Il se met à genou avec un mal de tête qui lui foudroie le crâne pendant que le type se sauve en courant rejoindre sa moto garée un peu plus loin. Le type arrête sa course en se penchant en avant puis se redresse vivement en se secouant dans tous les sens tel un pantin désarticulé et s’écroule inerte, le sac toujours enserré dans une main. Laurent hurle tant la douleur est insupportable et des gens finissent par venir en aide à la femme et à Laurent se tenant toujours la tête en vomissant dans le caniveau. Les secours arrivent pour constater la mort du motard, la tête en bouillie engoncé dans son casque, un secouriste ne put s’empêcher de faire la remarque d’une ressemblance certaine avec un pot de sauce tomate, ils se sont donc concentrés sur la femme ainsi que Laurent qu’ils ont emmenés à l’hôpital.

 

Le lendemain, la femme, accompagnée de son mari, rejoint Laurent dans sa chambre pour le remercier d’avoir tenté une intervention envers son agresseur.

  • Je vous en prie, je n’ai rien fait puisqu’il a pris la fuite, dit Laurent.
  • Non pas du tout, je ne sais si vous y êtes pour quelque chose mais le motard est mort, dit la femme, et apparemment ce n’était pas très joli à voir.
  • Mort ! mais comment ça et…et vous avez pu récupérer votre sac alors.
  • Effectivement je l’ai récupéré, mais nous ne savons pas de quoi est mort mon agresseur, peut-être que la police nous en dira plus lorsqu’ils viendront prendre nos dépositions.
  • Ouais, peut-être et vous l’avez vu, le motard, quand il est mort ?
  • Non pas très bien, j’ai vu qu’il s’est arrêté, il a eu des sortes de convulsions et il est tombé, apparemment mort sur le coup.
  • Ah ! l’important c’est que vous n’ayez rien et que vous ayez récupéré votre sac.
  • Et je vous remercie encore d’avoir au moins essayé, sans vous, je ne sais pas jusqu’où il aurait été pour m’arracher mon sac.

La femme dépose une bise sur la joue de Laurent avant de prendre congé. Plus tard dans la journée des policiers viennent prendre la déposition de Laurent.

  • Bonjour monsieur
  • Bonjour
  • Nous venons voir si vous pouvez nous parler de l’agression !
  • D’accord. Laurent explique comment elle s’est déroulée.
  • Et que savez-vous sur la mort de l’agresseur ? demande un des policiers
  • Rien du tout, je vous rappelle que j’ai pris son casque dans la gueule et qu’en plus j’ai eu une crise à ce moment-là et je n’ai rien vu.
  • Le type a eu la tête broyée comme une pastèque trop mûre qui aurait explosé, mais à l’intérieur de son casque, et c’est là que nous avons un peu de mal à comprendre.
  • Que voulez-vous que je vous dise ?
  • Comment c’est possible ?
  • Et comment voulez-vous que je le sache.
  • Je ne sais pas, peut-être que vous lui avez injecté quelque chose en le poussant, dit l’autre policier
  • Vous êtes sérieux là ! j’essaie de sauver une personne de son agresseur et vous allez me mettre sa mort sur le dos !
  • Non, nous n’en sommes pas encore là, ce sont juste des spéculations, je crois savoir que vous vous trouviez aussi sur l’accident de la rue du moulin, vous savez cette voiture qui a malencontreusement fini sa course dans un immeuble, plié en deux on ne sait pas comment, vous vous trouviez sur place aussi ! pour l’affaire du motard nous attendons les résultats de l’autopsie. Nous vous tiendrons au courant, bonne journée !

Laurent est dépité, lui qui voulait jouer les bons samaritains, se retrouve mêlé dans cette affaire, dans ces deux affaires, comme suspect. La nuit suivante le sommeil de Laurent est agité, il rêve de l’agression ou plutôt il en fait une version cauchemardesque, il se revoit poussant l’agresseur puis le coup de casque et au lieu de se tenir la tête, Laurent se voit positionné devant l’agresseur prenant la fuite se dirigeant sur lui, apparemment son agresseur ne le voit pas et fonce sur Laurent délibérément, Laurent lui balance son poing dans le ventre, le type se plie, puis Laurent le frappe dans le casque, le type se redresse, et enfin Laurent passe sa main à travers la visière du casque lui attrape le visage et sert de toute ses forces jusqu’à ce que…Laurent se réveille en sursaut, trempé de sueur, faisant sonner toute les machines branchées sur son corps.

  • Qu’est-ce que ça veut dire, dit-il tout haut.

Laurent se demande s’il est possible que ces personnes soient décédées à cause de lui.

  • Non ce n’est pas possible, pense-t-il. Et puis d’abord comment aurais-je pu faire, il aurait fallu être au moins deux et pour l’accident de la rue du moulin, il aurait fallu quelqu’un de balaise ou même un géant pour déplacer la voiture comme ça, surtout à la vitesse à laquelle elle allait.

Laurent se posait diverses questions relatives aux deux affaires, sans toutefois trouver de réponse cohérente et surtout pragmatique quand des infirmières entrent dans la chambre.

Le lendemain un des deux policiers revient voir Laurent pour lui parler des résultats de l’autopsie.

  • Sa tête a été littéralement pulvérisée ou plutôt elle a implosé comme un téléviseur, vous voyez. Apparemment il n’y a aucun rapport avec vous et la mort de l’agresseur. Mais moi, lui dit le policier en s’avançant vers Laurent, je reste persuadé que vous y êtes pour quelque chose, de près ou de loin et croyez-moi, je vais vous surveiller et je vais trouver.

Le policier prenait un air condescendant pour parler à Laurent qui sent comme un vertige le submerger et le mal de tête qui pointe le bout de son nez, Laurent, toujours branché au monitoring, sa tension se met à grimper en flèche faisant sonner les appareils encore, les infirmières et les aides-soignantes accourent dans la chambre de Laurent pour lui administrer un sédatif et faire sortir le policier.

  • Il se casserait une jambe pour venir me raconter des conneries pareilles, pense-t-il juste avant que le produit ne fasse effet et que le policier ne parte.

Du personnel médical court dans les couloirs et Laurent voit passer un aide-soignant avec une chaise roulante en direction des ascenseurs. Le policier était pressé et voyant le monde qui attendait devant l’ascenseur, prend l’escalier en le dévalant quatre à quatre, pour en définitif, rater une marche ; il se fracture une jambe en deux endroits, le tibia et le péroné. C’est une aide- soignante qui raconte à Laurent, le soir venu, les mésaventures du pauvre policier.

  • Une belle gueule, mais d’une arrogance déconcertante, dit l’aide-soignante à Laurent.
  • Oui c’est certain,
  • Est-ce que le sédatif vous a fait du bien ?
  • Oh oui, vous n’avez pas idée,
  • Tant mieux, passez une bonne nuit.
  • Merci.  

Laurent comprend que quelque chose se passe et que cette chose le dépasse un peu ; à chaque fois qu’il en avait après quelqu’un, il arrivait une catastrophe à cette personne, comme l’indiquait l’incident avec le policier, qui lui n’est pas mort,.

  • Ce serait quoi, une sorte d’ange gardien ! pense Laurent.

A ces mots, Laurent se remémore son accident dans lequel il aurait dû y rester, la superbe soirée passée en compagnie de Séverine au restaurant, les douces paroles échangées, les projets qu’ils auraient en commun, le bébé qu’ils envisageaient sérieusement de faire ensemble et le retour dans leur appartement pour faire l’amour, l’urgence de renter rapidement pour se donner l’un à l’autre, Séverine ronronnant comme une chatte dans son cou, une main sur son entrejambe, passer rapidement ce stupide feu orange pour ne pas perdre de temps et ensuite…et ensuite ce réveille difficile après plusieurs jours de coma, suivi de plusieurs opérations pour essayer de le remettre d’aplomb accompagné de semaines de rééducation pour un résultat plus que probant. Le seul problème que les médecins ne comprennent pas, mis à part la gravité de l’accident, le coma et surtout le réveil si difficile, il se serait produit une anomalie pendant le coma de Laurent et les médecins sont incapables de savoir ce qui s’est produit, par contre ils sont presque certains que c’est la cause des maux de tête et des acouphènes, de cette façon ils ne peuvent faire le lien entre l’anomalie et ses maux puisqu’ils n’ont pas pu déterminer les causes de l’anomalie.

  • Qu’est-ce qui a bien pu se passer pendant mon coma ? et pourquoi j’ai rêvé que je tuais moi-même ce type ?

Les questions se bousculent dans la tête de Laurent et tout ce qui lui revient c’est son accident. Ce remémorant pour la énième fois le déroulement du film qui comme à chaque fois, se termine tragiquement avec la mort de Séverine sa bien-aimée, à cause de ce taré qui avait grillé un feu rouge à une intersection voulant échapper aux policiers. Laurent et Séverine ont pris de plein fouet la voiture côté passager, alors qu’ils revenaient d’une soirée, tuant Séverine sur le coup et blessant Laurent grièvement. Le fugitif est sorti de l’accident juste avec le nez cassé à cause de l’airbag et qui depuis, purge sa peine de prison. Laurent s’en voulait d’autant plus qu’il était passé à l’orange, alors qu’en s’arrêtant au feu, il ne se serait rien passé, à part le spectacle de la poursuite des trois véhicules sous leurs yeux ; tout s’est joué à une fraction de seconde près. Laurent repense à ses derniers jours et aux évènements qui se sont produits, à chaque fois qu’il est confronté à une situation tragique, il arrive malheur à son offenseur. Laurent se met à penser au meurtrier de sa compagne, qu’il avait rencontré lors de son jugement et oh ! Combien il avait voulu sa mort, maintes fois il avait voulu le tuer lui-même, il aurait voulu le massacrer lui-même. Un vertige envahit Laurent suivi de nausées puis d’un mal de tête phénoménal, les appareils restés branchés à Laurent s’affolent, qui font accourir les infirmières de garde, Laurent se penche hors du lit pour vomir tout ce qu’il peut. Cramponné au lit et suant à la façon d’un drogué.

 

Laurent se voit courant dans les rues ou plutôt bondir dans les rues et dans les campagnes jusqu’à un grand bâtiment, vraisemblablement dans une autre ville, Laurent ne reconnais pas l’endroit. Il rentre dans le bâtiment sans que les gens ne le voient, comprenant qu’il se trouve dans une prison en parcourant les couloirs et vérifiant les cellules une par une à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un. Tout le monde dort sauf quelques gardes qui font leurs rondes et enfin trouve le meurtrier de sa femme. Il s’arrête juste un instant pour l’observer dormir profondément ; visiblement confortablement blottit dans les bras de Morphée. Il s’avance, passe à travers la lourde porte et attend que le garde, qui se trouve dans le couloir, ne soit plus en mesure de les entendre ou tout du moins, suffisamment loin pour qu’il est le temps de faire son affaire. Il empoigne la personne par la tête, dormant sur la couchette du haut et l’empêche de crier, le sort de son lit sans ménagement et le propulse simplement à l’aide d’un bras, en haut d’un des murs à un angle du plafond pour lui infliger des coups de poing sur tout le corps, la violence des coups est telle que la personne reste collée dans le coin de la cellule par le sang qui  gicle de son dos et la force asséné par les coups, les os explosent sous l’assaut des coups portés, la peau éclate à la façon d’un fruit trop mûr,  dégoulinant des entrailles les viscères et autres organes pulvérisés par la force des impacts, se déversent sur le sol. L’offensive ne dure que quelques secondes dans un silence moribond, uniquement troublé par le bruit sourd des impacts dans la chair. Le codétenu dans la cellule se réveille à cause de l’odeur du sang et de la puanteur des organes et surtout en voyant le corps collé au plafond, le pauvre type, qui n’avait rien demandé à personne, hurle de terreur en tambourinant sur la porte, que le diable est venu dans sa cellule.

 

Laurent est informé par son avocat le lendemain, du décès de la personne mise en cause dans son accident ainsi que des circonstances de sa mort. Laurent baisse la tête et pleure un peu parce qu’une justice a enfin été rendue, même si elle n’est pas orthodoxe et aussi parce qu’il sait être à l’origine du massacre du prisonnier, ne comprenant toujours pas comment cela était possible.

À cause de la dernière crise, Laurent est contraint, et presque forcé, de rester en observation une nuit supplémentaire et dans le courant de la nuit une personne se glisse dans sa chambre en rasant les murs.

  • J’ai le doigt posé sur le bouton d’appel, dit Laurent, alors vous avez trois secondes pour me dire ce que vous venez faire dans ma chambre à une heure pareille ?
  • Je me doutais bien que je vous trouverais réveillé, avec toutes ces questions auxquelles vous ne trouvez pas de réponses.

Laurent allume la lumière au-dessus de son lit, déversant sa lumière blanche pour apercevoir  un petit bonhomme sans âge au pied de son lit dans un costume gris tout droit sorti des années cinquante.

  • Et vous allez pouvoir y répondre !
  • Sans aucun doute, peut-être pas tout, mais à certaines en tout cas.
  • Ah bon, et qu’est-ce qui vous fait croire ça ?
  • Je suis l’actualité de près voyez-vous et beaucoup de personnes commencent à s’intéresser à vous, sans compter ce pauvre policier qui ne vous lâche plus, en fait je viens surtout vous parlez de vos facultés.
  • Mes facultés !
  • Et oui, somme de tous vos soucis depuis quelques jours.
  • Et quelles sont-ils ? 
  • Comment vont vos maux de tête ? je crois savoir que vous avez eu une crise récemment !
  • Effectivement, j’ai eu une crise la nuit d’avant.
  • Et à chaque fois que cela survient, c’est à cause d’un énervement ou d’une pulsion.
  • Vous êtes bien renseigné.
  • Et vos acouphènes vous arrivez à les gérer ?
  • Ah…d’accord vous allez pouvoir me dire de quoi je souffre, alors que les médecins sont incapables de me dire ce que j’ai.
  • Oui, exactement.

Laurent reste bouche bée, ne sachant quoi répondre.

  • Tout ce qui vous arrive et lié à votre accident.
  • C’est pour ça que je n’arrête pas d’y penser !
  • Oui, absolument, votre corps essaie de vous faire comprendre certaines choses et apparemment il n’y arrive pas. Pour faire court, voyez-vous, tout le monde sur terre à un ange gardien
  • C’est quoi ces conneries !
  • Ne m’interrompez pas s’il vous plaît, alors je disais que tout le monde sur terre à un ange gardien qui est plus ou moins présent aux côtés de leurs hôtes et les vôtres, à vous et votre compagne, étaient très présents, malheureusement cela n’a pas permis à votre compagne de continuer à vos côtés. Quoi qu’il en soit, lors de l’accident votre ange gardien à fait une chose stupide, en fusionnant avec vous pour vous permettre de vivre, c’est pour ça que vous avez ces acouphènes et d’ailleurs, je ne comprends pas pourquoi il n’a pas essayé de communiquer avec vous.
  • Vous voulez dire que normalement…à cette heure, je devrais être…mort !
  • Oui.
  • Ah mais oui, ça y est je comprends, il a essayé de communiquer avec moi, je n’avais pas compris, mais maintenant que vous me le dites.
  • Comment s’y est-il employé ?
  • En me faisant voir et la nuit d’avant, il m’a même fait participer.
  • Oh ! il vous a fait participer au massacre dans la cellule !

Laurent n’est pas surpris que cette petite personne se trouvant devant son lit, soit au courant que la mort de l’assassin de sa femme et lui soient liés.

  • C’était un peu dégueulasse d’ailleurs. Ok, maintenant je fais comment pour me débarrasser de mon ange gardien, qu’il sorte de mon corps ?
  • Il suffit de lui demander et s’il est d’accord, alors il partira, mais s’il vous quitte et bien vous mourrez.
  • Oh ! forcement, c’est évidemment, et si je ne fais rien et que je le garde avec moi…en moi ! enfin vous voyez quoi ?
  • Au bout d’un certain temps il y aura un conflit entre vous et votre ange gardien et il aura peut-être envie de prendre les commandes, de vous supplanter au profit de votre personne et de votre corps, de vivre sa vie ou alors il se peut qu’il ne fasse rien et patiente avec vous jusqu’à la mort parce que la situation lui convient.
  • Jusqu’à la mort et pendant ce temps-là, à chaque fois que je vais piquer une crise de nerf ou me mettre en colère, quelqu’un risque de mourir !
  • Oui c’est une possibilité, dorénavant il ne tient qu’à vous de faire un choix, maintenant que vous êtes au courant de votre condition et de vos facultés.

Laurent baisse la tête regardant ses mains en se curant les ongles.

  • Est-ce que j’ai vraiment le choix…

Une aide-soignante entre dans la chambre en frappant doucement à la porte.

  • Vous ne dormez toujours pas, ce n’est pas sérieux,  voulez-vous quelque chose pour vous aider à dormir ?

Laurent est un peu surpris de ne trouver personne dans la chambre et si l’aide-soignante avait vu sortir quelqu’un, elle lui aurait certainement demandé des comptes.

  • Non merci, je crois que je vais pouvoir dormir maintenant, dit-il en s’allongeant et en se tournant.

 

Maintenant, assis sur ce banc à regarder des pigeons idiots, Laurent fait un point sur sa vie, sur ce qu’il a fait depuis que le bonhomme est venu le voir dans sa chambre d’hôpital il y a plusieurs mois. Laurent a fait quelques crises, certaines fois devant sa télévision, et les forces de l’ordre ont eu plusieurs morts inexpliquées à gérer et certaines, de temps à autre, dans des pays lointains. Cette faculté de supprimer des gens confortablement installé dans son fauteuil est peut-être prodigieuse ou même considéré comme étant miraculeuse, mais ce que veut Laurent c’est en finir parce qu’il est fatigué ; fatigué à cause de ses maux de tête qui l’éreinte pendant des jours, fatigué de devoir rendre des comptes à ce flic borné qui est même venu le persécuter chez lui en béquille, fatigué par tout ce qu’il subit…fatigué d’être seul. Tous ces délits auxquels il participe, lui laisse un goût amer ; il n’est pas l’archange Gabriel ! Lui, ce qu’il veut, c’est vivre normalement, c’était vivre avec Séverine à ses côtés, cette vie, un abruti lui a enlevé et il s’en veut tout les jours de ne pas avoir respecté ce stupide feu orange. Cette vie qu’on lui a offerte n’est pas la sienne, c’est celle de son ange gardien qui la vit à travers lui, à une seconde près tout ça n’aurait jamais eu lieu et aujourd’hui ils en riraient avec Séverine d’avoir assisté à cette course poursuite.

À une seconde près.

Et surtout, surtout en finir avec ces maux de tête et notamment ces acouphènes incessants qui ne lui laissent aucun répit, qui l’empêchent de dormir…qui le rendent barjot.

 

Après mûre réflexion, Laurent a pris sa décision...

 

Liancourt Saint-Pierre

Vendredi 8 mars 2013

Réécris le 10 décembre 2021

Tag(s) : #nouvelles, #au-delà des contrées, #Fantastique
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